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VAUBAN

 

1. Introduction
2. L'architecture
3. Le fonctionnement
4. La forteresse de Lille
5. La stratégie de l'attaquant
6. La personne humaine selon Marlborough
7. La stratégie de Vauban
8. La fin de civilités

1.Introduction

Les forteresses et les sièges jouent un très grand rôle dans l’histoire des campagnes de Marlborough. Années après années, l’histoire se répéta dans ses grandes lignes. L’armée A mettait le siège devant une forteresse ou une autre, l’armée B, y envoyait les restants d’une colonne, une bataille suivait, l’armée vaincue se retirait et le siège était soit levé, soit poursuivi.

2. L'architecture

Le style d’architecture des forteresses et les méthodes classiques de siège par sapes et tranchées parallèles, gabions et fascines, sont caractéristiques de l’époque. De tous les architectes, le premier est le français Sébastien Le Prestre De Vauban.

Un fort à la Vauban est un ouvrage étendu suivant des caractéristiques géométriques tracées à la règle et au compas, et répondant à certaines techniques. Au début, l’espace à protéger (par exemple, une ville) est entouré par un polygone régulier, en général un pentagone ou un hexagone. Les coins de cette figure sont appelés soit des sommets, soit des points saillants. La distance entre deux points saillants sera très importante pour ce qui suit. Le standard répandu est de 330 mètres.

On prend alors le milieu de la ligne entre deux sommets et sur la perpendiculaire, on mesure 55 mètres à l’intérieur (c’est à dire le sixième de la distance entre sommets pour un hexagone et le septième pour un pentagone). On joint le point obtenu aux saillants par des lignes droites et on mesure sur celles-ci deux septièmes de leur longueur. Ceci donne les contreforts du bastion. On répète cette procédure sur tout le polygone pour obtenir la fortification de base. On creuse en bas des remparts, on fait des fossés et des douves tout autour de la ville. La mise d’eau stagnante dans les fossés sera assez néfaste pour la santé des habitants, aussi on déroute souvent une rivière pour alimenter celles-ci dans les cas où cela est possible.

3. Le fonctionnement

Comment tout cela fonctionnait-il? Essayons de décrire une journée au cours de laquelle un assaut est effectué par des assiégeants. Lorsque les troupes approchent du fossé, elles subiront des tirs de flancs venant de deux ou même de trois directions à la fois, de la part des troupes bien retranchées ne pouvant rien subir de la part des attaquants.

Naturellement, la défense ne fait que commencer. Si les intentions des attaquants visent à traverser les fossés pour donner l’assaut aux remparts, le meilleur moyen de les tromper est de les laisser perdre leur temps à la capture de quelque chose d’inutile qui aura été construit en plus à l’extérieur des remparts principaux. Ces défenses supplémentaires peuvent être de formes et de tailles très différentes, redoute, ravelin, tenaille, contre-garde, demi-lunes, etc. Toutes peuvent être ajoutées aux fortifications dans des limites souhaitées ou dans la limite des crédits disponibles.

4. La forteresse de Lille

La campagne de 1708 tourna autour de ce qui est, en général, reconnu pour le chef d’oeuvre de Vauban, la forteresse de Lille. Une ligne de bastions entourait la ville et les deux points les plus vulnérables, les portes de la ville, furent protégés par l’adjonction de deux demi-lunes alors que l’étendue de terrain entre elles comportait deux ravelins et une paire de tenaillons. La rivière Deule fut utilisée pour fournir les besoins en eau à chaque ouvrage de défense.

Après la chute de la ville, les défenseurs durent refaire les ouvrages qui avaient souffert, alors qu’un noyau restreint de défenseurs avait fait retraite dans la citadelle, qui comportait presque plus de fortifications que tout le reste de la ville.

On peut s’étonner, à l’étude des fortifications, que la ville tint du mois d’Août au mois de Décembre.

On peut également se demander pourquoi la ville finit par tomber. C’est que Vauban lui-même s’était penché sur le problème. Ayant mis tout son art à défendre des places fortes, il termina son oeuvre en écrivant un livre sur la manière de prendre de telles places fortes.

 

5. La stratégie de l'attaquant

On devait commencer à environ 500 mètres des fortifications ennemies en creusant une tranchée le long de ce qui devait être pris d’assaut. Celle-ci est nommée la première parallèle. Il est essentiel qu’elle soit creusée au cours d’une seule nuit (toute personne qui serait visible à l’aurore pourrait être abattue).

Au cours des jours suivants, cette parallèle devait être élargie afin de la rendre plus confortable (les assiégeants avaient à y vivre plusieurs semaines) et munies d’emplacements d’artillerie. Lorsque cela était fait, les pièces d’artillerie pouvaient canonner les remparts tandis que le génie commençait à creuser des sapes plus en avant. En général, les sapes étaient creusées de manière zigzaguante, afin de ne pas offrir aux défenseurs la possibilité d’effectuer des tirs directs sur les tranchées.

Lorsque les sapes couvraient 300 mètres d’avancées, la deuxième parallèle pouvait être creusée (de nouveau en une seule nuit). On amenait ensuite les canons à leurs nouveaux emplacements et l’on recommençait.

Lorsque la troisième parallèle était sur le point d’être creusée, il fallait que les batteries d’artillerie aient eut un effet certain, c’est à dire qu’elles aient pu ouvrir une brèche dans les remparts. La troisième parallèle serait concentrée à cet endroit. Au cours de la nuit choisie, elle serait remplie avec des troupes triées sur le volet, épaule contre épaule, ayant un courage à toute épreuve, pour être lâchées sur les remparts.

6. La personne humaine selon Marlborough

Des variations sur ce thème sont possibles. La plus répandue étant que les troupes brûlent la place forte après avoir violé les femmes, mais on ne s’y arrêtera pas. Lorsqu’une brèche a été ouverte et que la troisième parallèle a été creusée, les défenseurs auront alors tout fait pour entraver les assaillants. La garnison peut être appelée à se rendre pour éviter les pertes en vies humaines dans les deux camps et les honneurs de la guerre peuvent lui être accordés. La garnison sortira alors, saluée par ses adversaires, rendra ses armes et s’en ira. Auparavant elle aura probablement donné sa parole de ne plus combattre pour le restant de la saison. Les blessés, parmi les défenseurs, seront placés sous la responsabilité du commandant des attaquants. Marlborough fut toujours très pointilleux à propos de la personne humaine en ce qui concerne ce sujet.

Des défenseurs actifs essayeront d’empêcher le siège dès les premiers jours, en effectuant des sorties, par exemple pour faire des raids sur la deuxième parallèle dans le but de prendre des mousquets, de combler les tranchées et de tuer autant de troupe du génie qu’ils le peuvent. A Tournai, en 1709, la terre meuble et l’expérience des défenseurs mena à une variante de sapes et de contre-sapes (percement d’un tunnel sous une batterie assaillante, y mettre des explosifs, allumer la mèche et se retirer rapidement). Marlborough perdit 5 300 hommes à Tournai et les français 3 000. Ces pertes, ajoutées à celles de Malplaquet ensuite, la même année, amenèrent une furieuse opposition des Tories dans la poursuite de la guerre. Deux ans plus tard, elle se terminait.

 

7. La stratégie de Vauban

Vauban était tout à fait clair sur son point de vue. Avec assez de temps, un assiégeant déterminé gagnerait toujours. Ceci est probablement la cause de ce que les défenseurs eurent presque toujours des propositions de reddition. Le problème des forteresses est uniquement une question de sursis, sursis jusqu’à l’arrivée de l’hiver ou jusqu’à l’arrivée d’une colonne de secours qui livrera bataille. De toute façon, quel que soit le sursis, les assiégés finiront toujours par capituler.

En pratique, chaque siège de l’époque suivit les descriptions de Vauban. L’exception qui confirme la règle, fut le siège de Gibraltar. Les défenseurs eurent sans arrêt accès par mer, pour amener du ravitaillement, aussi ils ne purent être réduit à la famine. De plus, la nature du terrain (Gibraltar n’est qu’un immense rocher) ne put permettre l’établissement de tranchées. Une expédition navale française essaya de bloquer efficacement le siège, mais fut repoussée à la bataille de Marbella par la Royal Navy. Les français levèrent alors le siège et reculèrent laissant l’Empire Britannique inébranlé sur ses fondations.

8. La fin des civilités

Alors que les hommes s’entre-tuèrent en grand nombre, les conventions du XVIIe siècle concernant les sièges tendirent à ce que ceux-ci se déroulent d’une manière aussi civilisée que possible. Au temps des guerres napoléoniennes, l’ardeur révolutionnaire mit un terme à ce genre d’agrément. Le siège de Bajadoz par Wellington, par exemple, se termina par un assaut généralisé dont les horreurs restèrent proverbiales.

D’après Jim Hind - Wargamer n°61 ( Février 1987)