Diplomacy Machiavelli Diadoques Sengoku Symmachia La bataille de Waterloo World at war : des jeux diplomatiques et Wargames par e-mail
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PLAN DE
BATAILLE
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Trop souvent les
wargamers se contentent de lire la règle d'un jeu puis de disposer la carte et les pions, et
commencent à jouer immédiatement, sans trop savoir où ils vont; bref, ils
jouent au « pousse-pions " et attaquent tout ce qui
passe à leur portée. Voilà la meilleure façon de perdre, et même,
dans le cas où les adversaires sont aussi « intuitifs » l'un
que I'autre, de se dégoûter bien vite du wargame car Il est bien évident
que de telles parties ne présentent aucun Intérêt. Un vrai stratège planifie
toujours ses actions.
Pour commencer en
douceur, nous vous livrons les méthodes de planification appliquées à
l'offensive terrestre.
Cet article n'a pas
la prétention d'être complet. La planification est un art difficile et complexe,
que seuls les joueurs chevronnés apprécient à sa juste valeur. Les débutants
peuvent toutefois se familiariser avec ses principes, en comprenant tout d'abord
son bien-fondé.
La planification permet d'organiser une partie de bout en bout, de gérer les forces disponibles en cherchant à les économiser, d'ajuster ces forces aux objectifs utiles et de faire face aux revers de la fortune.
Elle repose sur une
division du terrain en lignes imaginaires permettant de visualiser les
différents aspects du plan d'opérations, de structurer les unités dans l'espace
et de contrôler leur action dans le temps. Elle englobe trois éléments :
Conception des
phases successives de la manœuvre devant mener à l'objectif souhaité,
Coordination des moyens disponibles,
Contrôle de l'exécution de la manœuvre.
La planification est identique dans son principe pour l'attaque et pour la
défense. Mais de sensibles différences existent quant à leurs modalités. C'est
pourquoi il ne sera ici question que de la planification d'opérations
offensives terrestres. Notre étude commence au moment où le joueur ayant pris
connaissance des conditions de victoire, se pose la question :
« Que faire pour gagner ? »
La partie peut être
décomposée en 5 phases, quel que soit le jeu. La conscience de ce fait est
capitale. Par ailleurs, la définition de l'objectif dans des limites
géographiques permet une organisation sommaire de la manœuvre. Dans un premier
temps nous nous posons la question :
« Que
faire ? »
1) L'approche : cette phase est absente dans les jeux où la
partie commence alors que les adversaires sont déjà face à face. Elle consiste
à déplacer les forces d'un secteur où tout contact avec l'adversaire est
impossible, à un secteur où ce contact devient probable. Le dispositif adopté
consiste à se garder de tous côtés, plus particulièrement dans la direction
supposée de l'adversaire. La reconnaissance prend une importance décisive dans
cette phase de jeu, et plus particulièrement dans les jeux en aveugle.
2) La
préparation : elle
commence lorsque l'adversaire est localisé et que les forces sont mises en
place pour la bataille, et se termine au moment où se produit la décision.
C'est pendant cette phase qu'il faut tout faire pour placer vos forces en
position favorable.
3) La
décision : l'instant où
se produit un évènement tel que ses conséquences rendent probable le gain de la
partie marque le début de cette phase, qui prend fin lorsque l'adversaire perd
tout espoir de redresser la situation en sa faveur et commence à désengager ses
forces. C'est le moment crucial de la bataille, celui pendant lequel les
efforts doivent être les plus soutenus.
4)
L'exploitation : elle
commence lorsque la décision semble assurée et qu'interviennent les réserves
destinées à la rendre irréversible.
5) La
poursuite : absente des
jeux tactiques, elle n'a de valeur que dans les jeux où la bataille a des
suites menant à d'autres opérations. Elle commence lorsque l'adversaire entame
sa retraite et quitte le champ de bataille, et se termine soit par la
destruction de l'armée adverse, soit par son rétablissement sur une nouvelle
position de défense.
1) Limites : un objectif peut toujours se traduire,
quand il ne l'est pas lui-même, par l'occupation d'une zone précise du champ de
bataille, entraînant par sa position même, la décision. La détermination de ses
limites sort du sujet de cet article mais coïncide, sommairement, avec le
secteur d'où l'on pourrait le plus facilement menacer les flancs ou les
arrières de l'adversaire. Toutefois, l'objectif peut également être envisagé
comme une étape de progression. Il varie en outre avec l'unité qui doit
l’atteindre : il sera différent pour un bataillon et pour la division à
laquelle il appartient. C'est la raison pour laquelle on distingue les
objectifs intermédiaires de l’objectif général.
2) L'objectif
général : c'est celui que
doit atteindre le joueur pour gagner la partie. Il se situe en général au-delà
de la ligne de front, dans la profondeur du terrain occupé par l'adversaire. La
plupart du temps, il ne peut être atteint qu'au cours de la phase
d'exploitation.
3) Les objectifs intermédiaires : ce sont toutes les positions
que devront occuper successivement les forces amies pour se rapprocher de
l'objectif général. Cette progressivité est nécessaire pour économiser les
forces et éviter les imprudences. Les objectifs intermédiaires sont situés
sur la ligne de front et dans le dispositif des réserves de l'adversaire.
Ils sont particuliers à chaque unité participant à l'attaque. Leur occupation
a lieu pendant les phases de préparation et de décision.
1 ) Les 4
formes de la manœuvre :
quel que soit le plan choisi, la manœuvre appartiendra toujours à l'une des 4
familles suivantes, avec plus ou moins de variantes, celles-ci étant
innombrables.
- L'attaque
frontale
Les unités se
portent en avant par le chemin le plus direct et engagent l'adversaire sur
toute la ligne de front. Ce type d'opération débouche sur une bataille d'usure.
Les deux adversaires se fixent mutuellement jusqu'à épuisement ou lassitude.
- La percée
Les unités
attaquent sur un front très étroit, de préférence au point de jonction entre
deux unités adverses. Elles créent une brèche, l'élargissent, ouvrant ainsi le
chemin vers l'objectif. La percée peut également être réalisée sur le front
d'une unité pour la séparer en deux parties que l'on pourra ensuite détruire
séparément.
- L'enveloppement
Les unités évitent
le contact frontal et, utilisant leur mobilité supérieure, tombent dans le
flanc ou sur les arrières de l'adversaire en effectuant un mouvement tournant.
- L'infiltration
De petites unités
profitent de conditions de visibilité réduite pour se glisser dans le
dispositif adverse, sans provoquer d'affrontement, pour y occuper des positions
avantageuses, capables d'appuyer l'assaut qui aura lieu ultérieurement.
2) Combinaisons
de manœuvre : la manœuvre est une combinaison de plusieurs
des formes évoquées ci-dessus. Par exemple, un enveloppement nécessite une
fixation frontale de l'adversaire, le temps d'effectuer le débordement. Il faut
toujours appuyer l'attaque principale par des attaques de diversion. Les
combinaisons sont les éléments de la réussite.
3) L'Importance du terrain : c'est très souvent le terrain qui dicte les formes que doit adopter la
manœuvre. Il est par exemple impossible d'envisager un enveloppement si l'on
ne dispose pas d'un espace suffisant sur les ailes, il faudra alors se résoudre
à effectuer une percée.
D) Schéma de la phase de
conception (figure 1 )
Connaissant les
phases successives d'une partie, ayant déterminé les limites géographiques de
son objectif général et analysé la structure du terrain, le joueur est en
mesure de choisir la combinaison qu'il pense être la plus prometteuse. Notre
exemple suppose une partie opposant deux divisions. Le joueur dispose de 3
brigades, son objectif se trouve à l'endroit indiqué et le terrain est dégagé sur
sa gauche. Il pense donc réaliser un enveloppement avec sa brigade de gauche,
tandis que les deux
autres fixeront l’adversaire par des attaques frontales. Ayant tracé les lignes
délimitant les secteurs qu'il assigne à ses 3 brigades en fonction de la manœuvre
envisagée (dépendant elle-même du terrain mais aussi de la disposition des
forces de l'adversaire si on la connaît, ce qui n'est pas toujours le cas,
(exemple les jeux en aveugle), il peut déterminer les objectifs intermédiaires
de chacune d'elles et matérialiser les phases de l'opération (préparation,
décision, exploitation).
Arrivé à ce stade,
la conception est terminée, la trame de l'opération établie. Il faut maintenant
articuler les forces pour optimiser leur action à l'intérieur de ce cadre.
Les moyens étant
nécessairement limités, la supériorité du joueur viendra de son aptitude à
gérer ses forces pour les utiliser au bon moment et au bon endroit.
A) Répartition
des moyens
" Une foule
n'est pas plus une armée qu'un tas de briques n'est une maison" (Sun T
se). Le joueur doit répartir ses moyens selon un classement lui permettant :
- d'économiser ses
forces,
- de se constituer
une réserve,
- d'intégrer ses
moyens au plan qu'il compte suivre.
A ce propos, les
unités peuvent être réparties en 3 groupes :
1) Forces de
couverture : leur mission est d'évaluer l'adversaire, de
reconnaître ses positions, de découvrir ses faiblesses, sans se laisser
accrocher ni détruire. Les unités choisies pour faire partie des forces de
couverture devront donc être peu nombreuses, mobiles et capables de tester
l’adversaire sans se laisser accrocher par lui.
2) Forces de manœuvre : déployées dans la zone de bataille principale (ZBP), elles auront à
supporter la majeure partie de l'effort et c'est d'elles que dépendra
l’essentiel du succès de l'opération.
3) Forces de réserve : extrêmement importantes, elles seront déployées en arrière de la ZBP et
auront pour tâche, une fois la décision obtenue, de relever les unités de
tête pour entamer l'exploitation. Elles ne participent pas à la décision,
mais sans elles, cette dernière ne sera pas durable et l'adversaire pourra
encore se rétablir.
La mise en forme
définitive du plan se résume à un schéma, dans notre exemple. Par sa
description même, le lecteur comprendra comment l'ensemble de ce que nous
venons d'évoquer s'intègre en un tout cohérent.
1) Division
Intérieure : il s'agit des limites tracées entre les
unités amies à l'intérieur de leur camp. Chacune des 3 brigades étant par
exemple, de structure ternaire, leurs régiments se placeront deux sur le front
et un en réserve. En arrière de la ZBP et plutôt sur la gauche, prendra place
la réserve générale de la division, celle qui sera utilisée pour
l'exploitation. Le front des régiments de 1 ère ligne forme la ligne extrême du
dispositif ami ou LEDA. La division intérieure revient à matérialiser l'ordre
de bataille ou OB résultant de la répartition des moyens. Dans notre exemple,
les forces de couverture sont intégrées dans la ZBP en limite de LEDA.
2) Division extérieure : ce sont les limites tracées sur l'espace occupé par l'adversaire. Dans
les jeux en aveugle notamment, il est impossible de connaître à l'avance le
dispositif adverse. Il faut donc se baser sur des données connues: objectifs,
terrain, espace et temps. Les 3 brigades ont chacune leurs limites et leurs
objectifs. Les points de suture de plusieurs limites coïncideront de préférence
avec des repères géographiques (village, bois, hauteur). Le secteur de la brigade
de gauche s'évase pour englober l'objectif général de la division, situé sur
une ligne imaginaire « Charlie ». Sur la ligne « Bravo »,
déterminant le début de l'exploitation, les brigades du centre et de droite
opèreront leur jonction et achèveront leur mission de fixation alors que la
réserve divisionnaire progressera vers l’objectif « Charlie ».
Chaque division
extérieur représente en réalité un horaire et un point de contrôle. C’est par
l’arrivée sur de telle ligne que tel évènement peut se produire. Exemple :
c’est par le franchissement de la LEDA que commence l’opération, et c’est par
l’occupation de la ligne « Bravo » que la réserve divisionnaire entre
en action. La ligne « Alpha » correspond à la préparation, la ligne « Bravo »
à la décision, et la ligne « Charlie » à l’exploitation. Dès lors, la
structure temporelle du plan est matérialisée par des repères imaginaires
coïncidant dans toute la mesure du possible, je le rappelle, avec des points « remarquables »
du terrain. Il est alors nécessaire de faire coïncider ces repères avec un
étalonnage horaire permettant de
mesurer facilement le temps écoulé et le temps restant.
Par exemple si la
partie dure 10 tours, on pourra s ‘en donner 6 pour atteindre la ligne
« Bravo » et 4 pour atteindre la ligne « Charlie ». Mais si
l’on veut se ménager une réserve de temps pour faire face à tout impondérable,
il faudra adopter l’étalonnage horaire et donc augmenter le rythme des
opérations.
L’ensemble du
schéma étant établi, la partie peut commencer. Mais la planification ne
s’arrête pas là. Il faut prévoir également ce qui pourrait se produire après le
déclenchement. C’est le problème du contrôle.
Le contrôle consiste à surveiller l’évolution des opérations, à rectifier les détails ne coïncidant pas avec la réalité observée et, en cas d’échec ou de revirement de situation, à faire face à la situation imprévue.
Comme nous l’avons déjà vu, c’est par l’arrivée des forces sur certaines lignes que l’on peut apprécier le retard ou l’avance pris par rapport à ce qui était prévu. Tout le problème consiste à maintenir la stabilité du rythme choisi. Il ne doit jamais être brutalement modifié. Plus vite une opération est achevée, plus vite la bataille se termine. Mais cette vérité doit être nuancée : c’est vrai si l’opération envisagée vise un objectif général, car dans ce cas c'est le gain de la partie. En revanche, dans une opération visant un objectif intermédiaire, il faut impérativement respecter les horaires sous peine de rompre la coordination des unités. En effet, si certaines prennent de l'avance et d'autres du retard, il en résulte des brèches dans le dispositif. Les unités se retrouvent alors isolées et s'exposent à être attaquées et battues séparément.
En fonction des circonstances, le joueur doit rester maître d'appuyer un effort, notamment en se ménageant une réserve d'appui-feu capable d'intervenir n'importe où et sans délai. C'est la raison pour laquelle il faudra établir une liste de répartition des appuis-feu reposant sur des priorités évaluées à l'échelon le plus élevé (la division dans notre exemple). Le classement des moyens réservés pourra être établi : 1) par arme, 2) par secteur, 3) par priorité de cibles. Exemple: la 2e batterie de réserve, si elle doit intervenir, le fera pour soutenir: 1) l'aile droite, 2) le centre, 3) l'aile gauche (puisque celle-ci bénéficie déjà, dans notre exemple, de la plupart des moyens réservés, on la place donc au dernier rang des demandeurs). En outre, cette batterie appuiera en priorité: 1) l'unité la plus exposée, 2) l'unité assurant la jonction avec la brigade voisine, 3) l'unité réalisant la meilleure avance (puisque dans notre exemple il est moins important d'avancer au centre et à droite, que de fixer l'adversaire et de maintenir la coordination avec les unités voisines).
L'engagement des réserves ne doit jamais être décidé au petit bonheur. Il faut, pour en obtenir les effets maximum, que soient réunies des conditions de temps et de lieu. Une réserve ne s'engage ni inutilement ni prématurément. Elle doit avant tout exécuter la mission pour laquelle on l'a créée, au moment et à l'endroit prévu par le plan. Par exemple, si la réserve divisionnaire est engagée pour soutenir l'attaque de l'aile droite qui s'avère plus prometteuse qu'on ne pouvait s'y attendre, avec quels moyens pourra-t-on exploiter le succès obtenu sur la ligne « Bravo » ? Chaque réserve est prévue pour un emploi et un seul. Désorganiser cette répartition à la légère ne peut que déboucher sur un désastre. Dans notre exemple, pour soutenir chacune des 3 brigades est constituée une réserve locale au moyen d'un des 3 régiments de la brigade. De cette façon, la réserve locale intervient dans ses limites et la réserve divisionnaire est conservée pour l'exploitation.
Comme le savent les joueurs avertis, une partie ne se gagne jamais grâce au hasard et à l'improvisation. Dans certains cas, on peut être soumis à des conditions de jeu extrêmement difficiles, au point que toutes les prévisions s'avèrent erronées, non par le fait du planificateur, mais par le fait de causes lui étant extérieures (exemple : entrée aléatoire de renfort). Cela ne doit pas l'empêcher d'organiser sa partie, parce que rien ne se gagne sans calcul. Beaucoup croient que le gain de la partie repose pour moitié sur le hasard, et pour moitié sur une évaluation plus ou moins fantaisiste des capacités de l'adversaire. Rien n'est plus faux. Le wargame est une discipline dans laquelle la méthode et l'organisation seules garantissent le succès. Il y faut également un peu de chance, certes. Mais on n’a jamais vu un joueur organisé perdre uniquement du fait de scores malheureux.
La planification est très utile et vous permettra d'économiser vos forces pour les employer au meilleur moment et au meilleur endroit.
Le plan d'opérations
Le plan est
probablement le point crucial d'une partie et celui que les joueurs
méconnaissent le plus. Beaucoup commencent une partie sans avoir la moindre
idée de ce qu'ils vont faire, sans plan défini, sans ligne de conduite. Ils
partent à l'aventure, guettant le moment opportun pour une action limitée et
sans résultat décisif. L'absence de plan mène à l'improvisation, aux
hésitations et au manque de suite dans les opérations. .
Toute opération
doit être faite par un système, parce que le hasard ne fait rien réussir. A la
guerre, rien ne s'obtient que par le calcul; tout ce qui n'est pas profondément
médité dans les détails ne produit aucun résultat. . (Napoléon).
Beaucoup de joueurs
comprendront par là les raisons de leurs échecs passés. Essayons donc
d'examiner le problème du plan, non en donnant des directives rigides, mais
comme à l'accoutumée des principes généraux vous aidant à rester sur la bonne
voie. Ces principes se divisent en deux: principes d'élaboration et principes
d'exécution.
Le plan est un
schéma de pensée, écrit ou non, qui détermine une suite d'opérations
coordonnées dont le résultat comporte le gain de la partie. Il est établi en
considérant la mission, 1'ennemi, les troupes disponibles, le terrain et le
temps alloué pour la partie. Son élaboration doit s'appuyer sur le respect de 4
principes :
simplicité, flexibilité, prévoyance, clarté.
Simplicité : la simplicité consiste à isoler
l'objectif à atteindre, déterminer le moyen le plus rapide pour
l'atteindre
et écarter tous les détails superflus. La caractéristique primordiale du
plan est de demeurer réalisable compte tenu des
moyens dont on dispose. Ces moyens étant nécessairement limités, il appartient
au joueur d'effectuer des choix et de prendre des risques qui garantissent la
réalisation des objectifs essentiels. Ce problème est crucial dans les parties
multi-joueurs. Chacun reçoit une mission précise qui doit rester à sa mesure et
facile à comprendre. Les champions de la complication furent les Japonais dans
toutes les batailles navales qu'ils livrèrent au cours de la 2e Guerre Mondiale
(Pearl Harbour excepté, mais
était-ce une bataille ?). Etudiez la structure de leurs plans et vous aurez une
idée de ce qu'il ne faut pas faire.
Flexibilité : le plan doit vous permettre d'adapter
vos réactions aux initiatives de l'adversaire. Il est absolument essentiel
d'éviter la rigidité et le dogmatisme. Votre plan doit préférer la définition
d'une ligne globale vous permettant d'agir dans une direction générale,
à l'établissement méticuleux et tatillon de la moindre de vos actions à venir.
Trouvez des repères généraux,
ayez une idée de manœuvre unique et ménagez-vous la ressource d'adapter votre
dispositif selon les circonstances.
Un plan doit théoriquement tout prévoir. Mais il y a toujours des données
inconnues, aléatoires ou déroutantes. Vous devez donc conserver une souplesse
de pensée et d'adaptation vous permettant de faire face malgré tout à
l'imprévu.
Prévoyance : votre plan doit comporter une ou
plusieurs solutions de rechange. L'adversaire peut éventer vos intentions,
anticiper vos mouvements, prendre des mesures, intuitivement ou par hasard, qui
rendent irréalisable votre plan initial. Une solution de rechange doit alors
être immédiatement disponible. Mise en oeuvre sans délai, elle vous permettra
de prendre ou reprendre l'initiative et de poursuivre vos actions offensives.
Il est impératif que la (ou les) solution(s) de rechange puisse être mise en
oeuvre à tout moment et quelle que soit la situation à cet instant. Avec de la
pratique, il vous sera facile de pressentir les points d'achoppement probables
ou possibles de votre plan principal et de prévoir en conséquence des solutions
satisfaisantes. C'est à cette faculté d'anticipation qu'on reconnaît les bons
joueurs. Et seule la pratique permet de la développer.
Clarté : la clarté consiste, tout au long de la
partie, à toujours savoir où vous en êtes. N'hésitez pas à faire un
croquis. Faites-y figurer seulement les limites de votre objectif, la position
de départ de vos unités, la position connue ou présumée de l'adversaire, et le
secteur dans lequel vont agir vos différentes formations. Pour chacune,
inscrivez dans son secteur, en un seul mot, sa mission. Au besoin,
entraînez-vous à définir les missions par des verbes à l'infinitif. Vous verrez
comme tout devient clair et combien de forces restent inemployées.
Principes
d'exécution du plan
Avoir un plan c'est
bien, mais ce n'est pas tout. Encore faut-il l'appliquer. Certains joueurs
bâtissent un plan mais ne le suivent absolument pas. D'autres le suivent
pendant un certain temps, puis s'en écartent définitivement à un moment donné.
D'autres encore ne font pas de plan du tout et réussissent à s'en bâtir un au
cours de la partie. Tous n'arrivent pas à grand chose et c'est toujours avec
beaucoup d'efforts. Quand on a un plan élaboré correctement, encore faut-il
l'appliquer et s'y tenir tout au long de la partie. Pour y parvenir, il faut de
la persévérance, de la détermination, de la rapidité et de l'opportunisme.
Persévérance : tenez-vous au plan que vous avez élaboré
et ne vous en écartez pas. Ce serait pire que de ne pas avoir de plan du
tout. Seuls les très bons joueurs peuvent se permettre d'improviser en
cours de partie. Encore qu'il ne s'agisse bien souvent que d'une variante de
leur plan initial, et non d'un plan nouveau. Napoléon criait au criminel si par
malheur un de ses subordonnés changeait de plan en cours de bataille. Ne
cherchez donc pas à bricoler, même si vous pensez, à un certain
moment, que tout est perdu. Persévérez dans votre plan qui, s'il est bien fait,
doit avoir tout prévu pour vous sortir des mauvais pas...
Détermination : vous avez un plan ? Il est mûrement pesé, bien réfléchi ? Oui, alors foncez. Ne voyez rien d’autre que l'aboutissement de vos opérations. Faites tout ce qui est en votre pouvoir pour le mener à bien. Soyez persuadé que ce que vous faites est positif. Il n'est plus temps de s'interroger lorsque la partie commence. C'est avant qu'il faut se poser des questions. Ensuite, il n'y a plus de temps pour hésiter. Votre attitude doit être inflexible et vos efforts converger vers le but à atteindre. Ne vous laissez pas distraire, influencer ou détourner de vos objectifs. Restez. verrouillé. dessus et marchez-y à travers les embûches et les contretemps. Si rien ne vous écarte de votre plan et qu'il a été établi après mûre et juste réflexion, vous gagnerez.
Rapidité : la rapidité est l'essence même de la
guerre. Elle permet d'abréger les approches, de bousculer l'adversaire en
le forçant à réagir avec un temps de retard, de réduire la vulnérabilité des
unités, d'affaiblir les risques de retournement de situation. Votre vitesse
dépend de votre rythme, il doit être supérieur à celui de l'adversaire si vous
voulez garder l'initiative. Frappez fort, là où la décision peut être obtenue
rapidement, évitez les combats retardateurs et les points de forte résistance,
maintenez la fluidité de votre dispositif, cherchez à atteindre votre objectif
au plus vite. Ne perdez pas de temps et foncez plutôt que de vous accorder du
répit. Ne laissez pas souffler l'adversaire et obligez-le à accélérer son
rythme pour l'empêcher de s'organiser.
Une attaque peut
manquer d'ingéniosité, mais il faut absolument quelle soit menée avec la vitesse
de l'éclair. (Sun Tzu).
Opportunité : demeurez à l’affût de l'occasion
qui, sur les points secondaires de votre dispositif, peut encore affaiblir
l'adversaire. Là où vous avez prévu de le fixer, le voilà qui entame un répit.
Ne le laissez pas s'en tirer à si bon compte : contre-attaquez, saisissez
l'occasion d'aggraver encore sa situation. Mais attention : opportunisme n'implique
pas absence de prudence. N'engagez rien de décisif sur une opportunité tant
que vous n'avez pas une solide expérience. Il faut beaucoup de pratique pour
juger d'un coup d’œil qu'une opportunité peut être décisive pour la suite
de la partie. Souvent, les joueurs croient la tenir, y concentrent tous leurs
moyens, sont violemment contre-attaqués et réduits à une défensive prudente.
Les débutants et les joueurs même un peu confirmés sont donc invités à suivre
ce conseil: ne vous précipitez pas sur l'opportunité qui vous conduit virtuellement
à modifier votre plan. Exploitez au contraire celle qui promet des résultats
inattendus, sans exiger de modification majeure de votre plan initial. On
peut même dire qu'une opportunité peut être exploitée dès lors qu'elle ne
demande pas d'autres forces que celles assignées au secteur dans lequel elle
se produit.