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PLAN DE BATAILLE

 

 

Plan de bataille – ( Extrait de Casus Belli n°44 et 45 – de Jean-Baptiste Dreyfus)

Comment planifier l’offensive terrestre.

Trop souvent les wargamers se contentent de lire la règle d'un jeu puis de disposer la carte et les pions, et commencent à jouer immédiatement, sans trop savoir où ils vont; bref, ils jouent au « pousse-pions " et attaquent tout ce qui passe à leur portée. Voilà la meilleure façon de perdre, et même, dans le cas où les adversaires sont aussi « intuitifs » l'un que I'autre, de se dégoûter bien vite du wargame car Il est bien évident que de telles parties ne présentent aucun Intérêt. Un vrai stratège planifie toujours ses actions.

Pour commencer en douceur, nous vous livrons les méthodes de planification appliquées à l'offensive terrestre.

 

Cet article n'a pas la prétention d'être complet. La planification est un art difficile et complexe, que seuls les joueurs chevronnés apprécient à sa juste valeur. Les débutants peuvent toutefois se familiariser avec ses principes, en comprenant tout d'abord son bien-fondé.

La planification permet d'organiser une partie de bout en bout, de gérer les forces disponibles en cherchant à les économiser, d'ajuster ces forces aux objectifs utiles et de faire face aux revers de la fortune.

Elle repose sur une division du terrain en lignes imaginaires permettant de visualiser les différents aspects du plan d'opérations, de structurer les unités dans l'espace et de contrôler leur action dans le temps. Elle englobe trois éléments :

Conception des phases successives de la manœuvre devant mener à l'objectif souhaité,
Coordination des moyens disponibles,

Contrôle de l'exécution de la manœuvre.
La planification est identique dans son principe pour l'attaque et pour la défense. Mais de sensibles différences existent quant à leurs modalités. C'est pourquoi il ne sera ici question que de la planification d'opérations offensives terrestres. Notre étude commence au moment où le joueur ayant pris connaissance des conditions de victoire, se pose la question :

« Que faire pour gagner ? »

 

Conception de la manœuvre

La partie peut être décomposée en 5 phases, quel que soit le jeu. La conscience de ce fait est capitale. Par ailleurs, la définition de l'objectif dans des limites géographiques permet une organisation sommaire de la manœuvre. Dans un premier temps nous nous posons la question :

« Que faire ? »

A) Les phases de la manœuvre

1) L'approche : cette phase est absente dans les jeux où la partie commence alors que les adversaires sont déjà face à face. Elle consiste à déplacer les forces d'un secteur où tout contact avec l'adversaire est impossible, à un secteur où ce contact devient probable. Le dispositif adopté consiste à se garder de tous côtés, plus particulièrement dans la direction supposée de l'adversaire. La reconnaissance prend une importance décisive dans cette phase de jeu, et plus particulièrement dans les jeux en aveugle.

2) La préparation : elle commence lorsque l'adversaire est localisé et que les forces sont mises en place pour la bataille, et se termine au moment où se produit la décision. C'est pendant cette phase qu'il faut tout faire pour placer vos forces en position favorable.

3) La décision : l'instant où se produit un évènement tel que ses conséquences rendent probable le gain de la partie marque le début de cette phase, qui prend fin lorsque l'adversaire perd tout espoir de redresser la situation en sa faveur et commence à désengager ses forces. C'est le moment crucial de la bataille, celui pendant lequel les efforts doivent être les plus soutenus.

4) L'exploitation : elle commence lorsque la décision semble assurée et qu'interviennent les réserves destinées à la rendre irréversible.

5) La poursuite : absente des jeux tactiques, elle n'a de valeur que dans les jeux où la bataille a des suites menant à d'autres opérations. Elle commence lorsque l'adversaire entame sa retraite et quitte le champ de bataille, et se termine soit par la destruction de l'armée adverse, soit par son rétablissement sur une nouvelle position de défense.

B) L'objectif

1) Limites : un objectif peut toujours se traduire, quand il ne l'est pas lui-même, par l'occupation d'une zone précise du champ de bataille, entraînant par sa position même, la décision. La détermination de ses limites sort du sujet de cet article mais coïncide, sommairement, avec le secteur d'où l'on pourrait le plus facilement menacer les flancs ou les arrières de l'adversaire. Toutefois, l'objectif peut également être envisagé comme une étape de progression. Il varie en outre avec l'unité qui doit l’atteindre : il sera différent pour un bataillon et pour la division à laquelle il appartient. C'est la raison pour laquelle on distingue les objectifs intermédiaires de l’objectif général.

2) L'objectif général : c'est celui que doit atteindre le joueur pour gagner la partie. Il se situe en général au-delà de la ligne de front, dans la profondeur du terrain occupé par l'adversaire. La plupart du temps, il ne peut être atteint qu'au cours de la phase d'exploitation.
3) Les objectifs intermédiaires : ce sont toutes les positions que devront occuper successivement les forces amies pour se rapprocher de l'objectif général. Cette progressivité est nécessaire pour économiser les forces et éviter les imprudences. Les objectifs intermédiaires sont situés sur la ligne de front et dans le dispositif des réserves de l'adversaire. Ils sont particuliers à chaque unité participant à l'attaque. Leur occupation a lieu pendant les phases de préparation et de décision.

C) Conception sommaire de la manœuvre

1 ) Les 4 formes de la manœuvre : quel que soit le plan choisi, la manœuvre appartiendra toujours à l'une des 4 familles suivantes, avec plus ou moins de variantes, celles-ci étant innombrables.

- L'attaque frontale

Les unités se portent en avant par le chemin le plus direct et engagent l'adversaire sur toute la ligne de front. Ce type d'opération débouche sur une bataille d'usure. Les deux adversaires se fixent mutuellement jusqu'à épuisement ou lassitude.

- La percée

Les unités attaquent sur un front très étroit, de préférence au point de jonction entre deux unités adverses. Elles créent une brèche, l'élargissent, ouvrant ainsi le chemin vers l'objectif. La percée peut également être réalisée sur le front d'une unité pour la séparer en deux parties que l'on pourra ensuite détruire séparément.

- L'enveloppement

Les unités évitent le contact frontal et, utilisant leur mobilité supérieure, tombent dans le flanc ou sur les arrières de l'adversaire en effectuant un mouvement tournant.

- L'infiltration

De petites unités profitent de conditions de visibilité réduite pour se glisser dans le dispositif adverse, sans provoquer d'affrontement, pour y occuper des positions avantageuses, capables d'appuyer l'assaut qui aura lieu ultérieurement.
2)
Combinaisons de manœuvre : la manœuvre est une combinaison de plusieurs des formes évoquées ci-dessus. Par exemple, un enveloppement nécessite une fixation frontale de l'adversaire, le temps d'effectuer le débordement. Il faut toujours appuyer l'attaque principale par des attaques de diversion. Les combinaisons sont les éléments de la réussite.

3) L'Importance du terrain : c'est très souvent le terrain qui dicte les formes que doit adopter la manœuvre. Il est par exemple impossible d'envisager un enveloppement si l'on ne dispose pas d'un espace suffisant sur les ailes, il faudra alors se résoudre à effectuer une percée.

D) Schéma de la phase de conception (figure 1 )

Connaissant les phases successives d'une partie, ayant déterminé les limites géographiques de son objectif général et analysé la structure du terrain, le joueur est en mesure de choisir la combinaison qu'il pense être la plus prometteuse. Notre exemple suppose une partie opposant deux divisions. Le joueur dispose de 3 brigades, son objectif se trouve à l'endroit indiqué et le terrain est dégagé sur sa gauche. Il pense donc réaliser un enveloppement avec sa brigade de gauche, tandis que les deux
autres fixeront l’adversaire par des attaques frontales. Ayant tracé les lignes délimitant les secteurs qu'il assigne à ses 3 brigades en fonction de la manœuvre envisagée (dépendant elle-même du terrain mais aussi de la disposition des forces de l'adversaire si on la connaît, ce qui n'est pas toujours le cas, (exemple les jeux en aveugle), il peut déterminer les objectifs intermédiaires de chacune d'elles et matérialiser les phases de l'opération (préparation, décision, exploitation).

Arrivé à ce stade, la conception est terminée, la trame de l'opération établie. Il faut maintenant articuler les forces pour optimiser leur action à l'intérieur de ce cadre.

 

Coordination des moyens

Les moyens étant nécessairement limités, la supériorité du joueur viendra de son aptitude à gérer ses forces pour les utiliser au bon moment et au bon endroit.

A) Répartition des moyens

" Une foule n'est pas plus une armée qu'un tas de briques n'est une maison" (Sun T se). Le joueur doit répartir ses moyens selon un classement lui permettant :

- d'économiser ses forces,

- de se constituer une réserve,

- d'intégrer ses moyens au plan qu'il compte suivre.

A ce propos, les unités peuvent être réparties en 3 groupes :

1) Forces de couverture : leur mission est d'évaluer l'adversaire, de reconnaître ses positions, de découvrir ses faiblesses, sans se laisser accrocher ni détruire. Les unités choisies pour faire partie des forces de couverture devront donc être peu nombreuses, mobiles et capables de tester l’adversaire sans se laisser accrocher par lui.

2) Forces de manœuvre : déployées dans la zone de bataille principale (ZBP), elles auront à supporter la majeure partie de l'effort et c'est d'elles que dépendra l’essentiel du succès de l'opération.

3) Forces de réserve : extrêmement importantes, elles seront déployées en arrière de la ZBP et auront pour tâche, une fois la décision obtenue, de relever les unités de tête pour entamer l'exploitation. Elles ne participent pas à la décision, mais sans elles, cette dernière ne sera pas durable et l'adversaire pourra encore se rétablir. 

B) Implantation des moyens (figure 2)

La mise en forme définitive du plan se résume à un schéma, dans notre exemple. Par sa description même, le lecteur comprendra comment l'ensemble de ce que nous venons d'évoquer s'intègre en un tout cohérent.

1) Division Intérieure : il s'agit des limites tracées entre les unités amies à l'intérieur de leur camp. Chacune des 3 brigades étant par exemple, de structure ternaire, leurs régiments se placeront deux sur le front et un en réserve. En arrière de la ZBP et plutôt sur la gauche, prendra place la réserve générale de la division, celle qui sera utilisée pour l'exploitation. Le front des régiments de 1 ère ligne forme la ligne extrême du dispositif ami ou LEDA. La division intérieure revient à matérialiser l'ordre de bataille ou OB résultant de la répartition des moyens. Dans notre exemple, les forces de couverture sont intégrées dans la ZBP en limite de LEDA.

2) Division extérieure : ce sont les limites tracées sur l'espace occupé par l'adversaire. Dans les jeux en aveugle notamment, il est impossible de connaître à l'avance le dispositif adverse. Il faut donc se baser sur des données connues: objectifs, terrain, espace et temps. Les 3 brigades ont chacune leurs limites et leurs objectifs. Les points de suture de plusieurs limites coïncideront de préférence avec des repères géographiques (village, bois, hauteur). Le secteur de la brigade de gauche s'évase pour englober l'objectif général de la division, situé sur une ligne imaginaire « Charlie ». Sur la ligne « Bravo », déterminant le début de l'exploitation, les brigades du centre et de droite opèreront leur jonction et achèveront leur mission de fixation alors que la réserve divisionnaire progressera vers l’objectif « Charlie ».

C) Coordination horaire

Chaque division extérieur représente en réalité un horaire et un point de contrôle. C’est par l’arrivée sur de telle ligne que tel évènement peut se produire. Exemple : c’est par le franchissement de la LEDA que commence l’opération, et c’est par l’occupation de la ligne « Bravo » que la réserve divisionnaire entre en action. La ligne « Alpha » correspond à la préparation, la ligne « Bravo » à la décision, et la ligne « Charlie » à l’exploitation. Dès lors, la structure temporelle du plan est matérialisée par des repères imaginaires coïncidant dans toute la mesure du possible, je le rappelle, avec des points « remarquables » du terrain. Il est alors nécessaire de faire coïncider ces repères avec un étalonnage horaire permettant  de mesurer facilement le temps écoulé et le temps restant.

Par exemple si la partie dure 10 tours, on pourra s ‘en donner 6 pour atteindre la ligne « Bravo » et 4 pour atteindre la ligne « Charlie ». Mais si l’on veut se ménager une réserve de temps pour faire face à tout impondérable, il faudra adopter l’étalonnage horaire et donc augmenter le rythme des opérations.

L’ensemble du schéma étant établi, la partie peut commencer. Mais la planification ne s’arrête pas là. Il faut prévoir également ce qui pourrait se produire après le déclenchement. C’est le problème du contrôle.

 

Le contrôle

Le contrôle consiste à surveiller l’évolution des opérations, à rectifier les détails ne coïncidant pas avec la réalité observée et, en cas d’échec ou de revirement de situation, à faire face à la situation imprévue.

A)Contrôle du rythme des opérations

Comme nous l’avons déjà vu, c’est par l’arrivée des forces sur certaines lignes que l’on peut apprécier le retard ou l’avance pris par rapport à ce qui était prévu. Tout le problème consiste à maintenir la stabilité du rythme choisi. Il ne doit jamais être brutalement modifié. Plus vite une opération est achevée, plus vite la bataille se termine. Mais cette vérité doit être nuancée : c’est vrai si l’opération envisagée vise un objectif général, car dans ce cas c'est le gain de la partie. En revanche, dans une opération visant un objectif intermédiaire, il faut impérati­vement respecter les horaires sous peine de rompre la coordination des unités. En effet, si certaines prennent de l'avance et d'autres du retard, il en résulte des brèches dans le dispo­sitif. Les unités se retrouvent alors isolées et s'exposent à être attaquées et battues séparé­ment.

B) Anticipation des besoins

En fonction des circonstances, le joueur doit rester maître d'appuyer un effort, notamment en se ménageant une réserve d'appui-feu ca­pable d'intervenir n'importe où et sans délai. C'est la raison pour laquelle il faudra établir une liste de répartition des appuis-feu reposant sur des priorités évaluées à l'échelon le plus élevé (la division dans notre exemple). Le classement des moyens réservés pourra être établi : 1) par arme, 2) par secteur, 3) par priorité de cibles. Exemple: la 2e batterie de réserve, si elle doit intervenir, le fera pour soutenir: 1) l'aile droite, 2) le centre, 3) l'aile gauche (puisque celle-ci bénéficie déjà, dans notre exemple, de la plu­part des moyens réservés, on la place donc au dernier rang des demandeurs). En outre, cette batterie appuiera en priorité: 1) l'unité la plus exposée, 2) l'unité assurant la jonction avec la brigade voisine, 3) l'unité réalisant la meilleure avance (puisque dans notre exemple il est moins important d'avancer au centre et à droite, que de fixer l'adversaire et de maintenir la coordi­nation avec les unités voisines).

C) Décision d'engagement des réserves

L'engagement des réserves ne doit jamais être décidé au petit bonheur. Il faut, pour en obtenir les effets maximum, que soient réunies des conditions de temps et de lieu. Une réserve ne s'engage ni inutilement ni prématurément. Elle doit avant tout exécuter la mission pour la­quelle on l'a créée, au moment et à l'endroit prévu par le plan. Par exemple, si la réserve divisionnaire est engagée pour soutenir l'atta­que de l'aile droite qui s'avère plus prometteuse qu'on ne pouvait s'y attendre, avec quels moyens pourra-t-on exploiter le succès obtenu sur la ligne « Bravo » ? Chaque réserve est prévue pour un emploi et un seul. Désorganiser cette répartition à la légère ne peut que débou­cher sur un désastre. Dans notre exemple, pour soutenir chacune des 3 brigades est constituée une réserve locale au moyen d'un des 3 régi­ments de la brigade. De cette façon, la réserve locale intervient dans ses limites et la réserve divisionnaire est conservée pour l'exploitation.

 

Conclusion

Comme le savent les joueurs avertis, une partie ne se gagne jamais grâce au hasard et à l'im­provisation. Dans certains cas, on peut être soumis à des conditions de jeu extrêmement difficiles, au point que toutes les prévisions s'avèrent erronées, non par le fait du planifi­cateur, mais par le fait de causes lui étant extérieures (exemple : entrée aléatoire de ren­fort). Cela ne doit pas l'empêcher d'organiser sa partie, parce que rien ne se gagne sans calcul. Beaucoup croient que le gain de la partie repose pour moitié sur le hasard, et pour moitié sur une évaluation plus ou moins fantaisiste des capacités de l'adversaire. Rien n'est plus faux. Le wargame est une discipline dans laquelle la méthode et l'organisation seules garantissent le succès. Il y faut également un peu de chance, certes. Mais on n’a jamais vu un joueur organisé perdre uniquement du fait de scores malheureux.

La planification est très utile et vous permettra d'économiser vos forces pour les employer au meilleur moment et au meilleur endroit.

 

THEORIE ET ANALYSE

Le plan d'opérations

Le plan est probablement le point crucial d'une partie et celui que les joueurs méconnaissent le plus. Beaucoup commencent une partie sans avoir la moindre idée de ce qu'ils vont faire, sans plan défini, sans ligne de conduite. Ils partent à l'aventure, guettant le moment opportun pour une action limitée et sans résultat décisif. L'absence de plan mène à l'improvisation, aux hésitations et au manque de suite dans les opérations. .

Toute opération doit être faite par un système, parce que le hasard ne fait rien réussir. A la guerre, rien ne s'obtient que par le calcul; tout ce qui n'est pas profondément médité dans les détails ne produit aucun résultat. . (Napoléon).

Beaucoup de joueurs comprendront par là les raisons de leurs échecs passés. Essayons donc d'examiner le problème du plan, non en donnant des directives rigides, mais comme à l'accoutumée des principes généraux vous aidant à rester sur la bonne voie. Ces principes se divisent en deux: principes d'élaboration et principes d'exécution.

 

Principes d'élaboration du plan

Le plan est un schéma de pensée, écrit ou non, qui détermine une suite d'opérations coordonnées dont le résultat comporte le gain de la partie. Il est établi en considérant la mission, 1'ennemi, les troupes disponibles, le terrain et le temps alloué pour la partie. Son élaboration doit s'appuyer sur le respect de 4 principes :
simplicité, flexibilité, prévoyance, clarté.

Simplicité : la simplicité consiste à isoler l'objectif à atteindre, déterminer le moyen le plus rapide pour l'atteindre
et écarter tous les détails superflus.
La caractéristique primordiale du plan est de demeurer réalisable compte tenu des
moyens dont on dispose. Ces moyens étant nécessairement limités, il appartient au joueur d'effectuer des choix et de prendre des risques qui garantissent la réalisation des objectifs essentiels. Ce problème est crucial dans les parties multi-joueurs. Chacun reçoit une mission précise qui doit rester à sa mesure et facile à comprendre. Les champions de la complication furent les Japonais dans toutes les batailles navales qu'ils livrèrent au cours de la 2e Guerre Mondiale (Pearl Harbour excepté, mais
était-ce une bataille ?). Etudiez la structure de leurs plans et vous aurez une idée de ce qu'il ne faut pas faire.

Flexibilité : le plan doit vous permettre d'adapter vos réactions aux initiatives de l'adversaire. Il est absolument essentiel d'éviter la rigidité et le dogmatisme. Votre plan doit préférer la définition d'une ligne globale vous permettant d'agir dans une direction générale, à l'établissement méticuleux et tatillon de la moindre de vos actions à venir. Trouvez des repères généraux,
ayez une idée de manœuvre unique et ménagez-vous la ressource d'adapter votre dispositif selon les circonstances.
Un plan doit théoriquement tout prévoir. Mais il y a toujours des données inconnues, aléatoires ou déroutantes. Vous devez donc conserver une souplesse de pensée et d'adaptation vous permettant de faire face malgré tout à l'imprévu.

Prévoyance : votre plan doit comporter une ou plusieurs solutions de rechange. L'adversaire peut éventer vos intentions, anticiper vos mouvements, prendre des mesures, intuitivement ou par hasard, qui rendent irréalisable votre plan initial. Une solution de rechange doit alors être immédiatement disponible. Mise en oeuvre sans délai, elle vous permettra de prendre ou reprendre l'initiative et de poursuivre vos actions offensives. Il est impératif que la (ou les) solution(s) de rechange puisse être mise en oeuvre à tout moment et quelle que soit la situation à cet instant. Avec de la pratique, il vous sera facile de pressentir les points d'achoppement probables ou possibles de votre plan principal et de prévoir en conséquence des solutions satisfaisantes. C'est à cette faculté d'anticipation qu'on reconnaît les bons joueurs. Et seule la pratique permet de la développer.

Clarté : la clarté consiste, tout au long de la partie, à toujours savoir où vous en êtes. N'hésitez pas à faire un croquis. Faites-y figurer seulement les limites de votre objectif, la position de départ de vos unités, la position connue ou présumée de l'adversaire, et le secteur dans lequel vont agir vos différentes formations. Pour chacune, inscrivez dans son secteur, en un seul mot, sa mission. Au besoin, entraînez-vous à définir les missions par des verbes à l'infinitif. Vous verrez comme tout devient clair et combien de forces restent inemployées.

 

Principes d'exécution du plan

Avoir un plan c'est bien, mais ce n'est pas tout. Encore faut-il l'appliquer. Certains joueurs bâtissent un plan mais ne le suivent absolument pas. D'autres le suivent pendant un certain temps, puis s'en écartent définitivement à un moment donné. D'autres encore ne font pas de plan du tout et réussissent à s'en bâtir un au cours de la partie. Tous n'arrivent pas à grand chose et c'est toujours avec beaucoup d'efforts. Quand on a un plan élaboré correctement, encore faut-il l'appliquer et s'y tenir tout au long de la partie. Pour y parvenir, il faut de la persévérance, de la détermination, de la rapidité et de l'opportunisme.

Persévérance : tenez-vous au plan que vous avez élaboré et ne vous en écartez pas. Ce serait pire que de ne pas avoir de plan du tout. Seuls les très bons joueurs peuvent se permettre d'improviser en cours de partie. Encore qu'il ne s'agisse bien souvent que d'une variante de leur plan initial, et non d'un plan nouveau. Napoléon criait au criminel si par malheur un de ses subordonnés changeait de plan en cours de bataille. Ne cherchez donc pas à bricoler, même si vous pensez, à un certain
moment, que tout est perdu. Persévérez dans votre plan qui, s'il est bien fait, doit avoir tout prévu pour vous sortir des mauvais pas...

Détermination : vous avez un plan ? Il est mûrement pesé, bien réfléchi ? Oui, alors foncez. Ne voyez rien d’autre que l'aboutissement de vos opérations. Faites tout ce qui est en votre pouvoir pour le mener à bien. Soyez persuadé que ce que vous faites est positif. Il n'est plus temps de s'interroger lorsque la partie commence. C'est avant qu'il faut se poser des questions. Ensuite, il n'y a plus de temps pour hésiter. Votre attitude doit être inflexible et vos efforts converger vers le but à atteindre. Ne vous laissez pas distraire, influencer ou détourner de vos objectifs. Restez. verrouillé. dessus et marchez-y à travers les embûches et les contretemps. Si rien ne vous écarte de votre plan et qu'il a été établi après mûre et juste réflexion, vous gagnerez.

Rapidité : la rapidité est l'essence même de la guerre. Elle permet d'abréger les approches, de bousculer l'adversaire en le forçant à réagir avec un temps de retard, de réduire la vulnérabilité des unités, d'affaiblir les risques de retournement de situation. Votre vitesse dépend de votre rythme, il doit être supérieur à celui de l'adversaire si vous voulez garder l'initiative. Frappez fort, là où la décision peut être obtenue rapidement, évitez les combats retardateurs et les points de forte résistance,
maintenez la fluidité de votre dispositif, cherchez à atteindre votre objectif au plus vite. Ne perdez pas de temps et foncez plutôt que de vous accorder du répit. Ne laissez pas souffler l'adversaire et obligez-le à accélérer son rythme pour l'empêcher de s'organiser.

Une attaque peut manquer d'ingéniosité, mais il faut absolument quelle soit menée avec la vitesse de l'éclair. (Sun Tzu).

Opportunité : demeurez à l’affût de l'occasion qui, sur les points secondaires de votre dispositif, peut encore affaiblir l'adversaire. Là où vous avez prévu de le fixer, le voilà qui entame un répit. Ne le laissez pas s'en tirer à si bon compte : contre-attaquez, saisissez l'occasion d'aggraver encore sa situation. Mais attention : opportunisme n'implique pas absence de prudence. N'engagez rien de décisif sur une opportunité tant que vous n'avez pas une solide expérience. Il faut beaucoup de pratique pour juger d'un coup d’œil qu'une opportunité peut être décisive pour la suite de la partie. Souvent, les joueurs croient la tenir, y concentrent tous leurs moyens, sont violemment contre-attaqués et réduits à une défensive prudente. Les débutants et les joueurs même un peu confirmés sont donc invités à suivre ce conseil: ne vous précipitez pas sur l'opportunité qui vous conduit virtuellement à modifier votre plan. Exploitez au contraire celle qui promet des résultats inattendus, sans exiger de modification majeure de votre plan initial. On peut même dire qu'une opportunité peut être exploitée dès lors qu'elle ne demande pas d'autres forces que celles assignées au secteur dans lequel elle se produit.